mar
17
2011
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Partie de ski

Aujourd’hui, on va relever les trappes. Kostia me file une paire de skis, qui s’attachent avec rien qu’une laniere, savamment bidouillee, comme tout le reste. On prend la piste qui part vers la colline, derriere la baraque. Kostia cache son fusil dans un fourre. Aux premieres petites descentes, j’ai bien remercie mes parraines et marents pour m’avoir offert la chance d’accumuler une petite experience en matiere de glisse et de ski alpin. Et puis j’ai vite capte que skier en pleine taiga, c’etait tout autre chose, hormis le fait que quand on demarre dans ce genre d’activites, il faut bien accepter un certain nombre de gamelles, se concentrer, se relever, et pas se decourager. J’ai cependant pas mal enrage: Kostia devant file a le perdre de vue, dans un decors qui me sublime, de ces Kedr enormes, de ce chaos artistique si caracteristique des forets sauvage, le tout traverse des rayons du soleil… mais pas une minute pour contempler, photographier, et se representer jusqu’ou je suis parvenue… pour une fois, le nez en l’air m’est impossible, il me faut lutter avec les branches au sol, les racines qui depassent, et toutes celles qui manquent de te voler ton chapeau. J’ai fini par m’en prendre une belle en plein dans l’oeil… histoire d’achever un premier tour en foret super ereintant. « T’inquiete, on a tous commence comme ca », me dira Liosha. « Plus tard, tu pourras y aller toute seule, aux zibelines ». Alors la, c’est sans problemes, mais alors « po-tixonku », certainement pas a ce rythme-la!

Sur la piste on en croise d’autres. Aujourd’hui, parmis les cervides toujours presents, un Lynx, les vieilles traces du Tigre, et des Zibelines un peu partout. La maniere la plus simple de les attrapper, c’est quand on a eu un cerf ou un sanglier. La peau represente toujours un peu de grignottage allecahnt. On la coince sous un arbre tombe, on la camouffle de branches, aussi pour pas que les oiseaux ne viennent s’y prendre. On pose les pieges en dessous, recouverts de poils. Et on passe le lendemain.

Y’a un chasseur a Krasnii-iar, qui attrappe toujours pres de 200 zibelines par an. LE territoire de predilection du coin. Kostia lui, doit en avoir au moins 5, achetee a prix bas par l’association Tigr, qui gere le territoire. Une fois a la barque, il leur enleve leur peau, l’enfile sur des tiges de bois pour qu’elle seche et s’etire. En quelques heure elle se met a ressembler a du papier journal. Died Edi raconte que selon les regions de russie, on prepare les peaux de zibeline differemment. Ca permet de les reconnaitre. Elles n’ont pas toutes la meme couleur, ni la meme qualite. En tout cas, ca a l’air d’etre un business encore en vogue dans tout le pays… (y’a qu’a se souvenir du quartier Russe a Pekin… une enfilade de boutiques a fourrure…)

Ecrit par admin_branchest in: Hiver,Kitaiskaia |
mar
14
2011
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Partie de peche

C’etait conclu avec Baba Maia: demain on part a la peche. Buran, hache et tronconneuse, bur (la scie a glace en tortillon), lignes, et quelques sacs de jute. La hache et la tronconneuse, c’est pour attrapper des vers, des koraiede, ces gros vers blancs qui mange l’ecocrce des vieux epiceas en general. Sans eux, c’est meme pas la peine d’essayer.

Et puis apres, il faut connaitre les bons coins. Les gars font des trous. Baba Maia regarde dedans… « pfeu, j’y vois rien, pas un poiscaille! » Elle plonge tout de meme sa ligne, attend quelques minutes en donnant des petits coups, de bas en haut. « Niet! Nichevo! Allons plus loin. Et puis la saison est bien avancee, le poisson commence deja a remonter le courant on dirait ».

Et comme ca petit-a-petit on fait des trous un peu partout, dans un decors de contes russe, scintillant de blanc et de glace, dans la realite d’une nature grandiose, belle de toutes ses courbes, berges, rivieres et affluents… « Tu vois, la, ou poussent les bouleaux et les epiceas. C’est que des gens ont vecu a l’epoque, des stara viere, (des croyants de l’ancien temps…). Ils ont tous ete deportes pendant le communisme. Ils avaient construit sur ces berges. Ce qu’on voit la, c’est ce qui a pousse apres eux ».

La 30aine de poissons attrappes ce jour-la semblait trop peu pour satisfaire. Mais une fois revenus a Laoxe, on trinque et se rechauffe, on s’fait nourrir ot dushe, « aller, a ta premiere peche, Marilia ».

Ecrit par admin_branchest in: Hiver,Kitaiskaia |
mar
14
2011
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Hommes a tout faire…

De l’autre cote de la rive, un couple de vieux communistes est installe a l’annee, dans une grande et plate clairiere. A l’epoque CCCP, les ruches de Died Edi etaient gouvernementales. Aujourd’hui ils sont quasi les seuls a vivre sur un terrain plus ou moins « prive », non revendique par l’association Tigr. Les interesses viennent acheter leur miel en helicoptere. Baba Maia le montre pas, mais je vois bien qu’elle est toute contente de nous savoir peut-etre bientot installes sur l’autre rive. Kostia et eux echangent des coups de mains precieux, et la compagnie de tiers personnes ne se refuse pas quand on vit si loin de tout. Quand son Edi est arrive a Krasnii-iar, quand elle eu reussi a l’attrapper, au debut il a fallu lutter: « un espion », disait-on. Et puis ce qu’il aimait c’etait etre en foret, alors ca l’a vite envoye travailler aux ruches de Laoxe, qu’il n’a plus quitte depuis. C’est elle, Baba Maia, qui faisait les aller-retours au village. Elle raconte: « A une epoque Baba Klava et son Ivan vivaient pas loin, a la Garela.  Ils venaient aussi nous aider, a porter les ruches, le miel, faucher le foin, tout ca. Z’avaient Kostia avec eux, j’l'ai vu grandir depuis tout petit! Il a tout appris ici, c’est son grand-pere qui lui a montre. C’est sur que pour survivre en foret, faut pas s’laisser aller. Faut crocher dedans, faut savoir faire. Ici les flemmards font pas long feu! Moi au debut j’avais tellement d’energie que je faisais 2 jardins: un au village, et un ici. Et puis Edi m’a montre comment poser les trappes pour les zibelines, comment pecher… Tu vas voir, Kostia, il va tout t’apprendre, pareil…! »

Faut dire que y’a de quoi! Depuis que les preparatifs de l’expedition sont lonces, Kostia et Liosha, ils arretent pas. Moi je regarde ce tourbillon sans trop savoir comment me placer pour aider, et faire avancer la machine. Ah, si, penser au the, au sucre, au lipioshkis, de quoi manger pour la route. Les agrements positifs, quoi!

A la barak, ils m’epoustoufflent: le poele, les reparations tronconneuse, le buran qui occupe encore des journees a lui tout seul, chercher du bois sec, fendre, cuisiner, preparer des balles et des cartouches, bidouiller les lanieres des skis, reparer des chaussures en cuir, y remettre une semelle de feutre, depeauter une zibeline, aiguiser son couteau, nourrir le chien, nettoyer le fusil, crapahuter toute la journee a la recherche de traces a suivre ou de pieges a poser, preparer les hamecons, fabriquer une pile pour la lumiere le soir (plus de bougies), reparer le groupe electrogene, chercher de l’eau, chauffer le bania, laver 3 fringues, rapiecer les trouees, reajuster la porte de la barak, refaire un manche pour tel outil, 3 branches de pin en guise de balais, et pour la pelle, on fait comment? etc, etc, etc…

Sans avoir besoin de se le dire, les taches se repartissent, au feeling, et aux besoins collectifs. Mais decidement, entre le village et ici, les mecs, la, c’est a peine si j’arrive a les reconnaitre!

Ecrit par admin_branchest in: Hiver,Krasnii-iar |
mar
12
2011
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Expedition, au-dela…

Le territoire de chasse des Kolenchuga, c’est 150km au-dela du village, le long de la Bikin. Une journee de route, quand on s’y met tot. Mais pourquoi se presser quand on sait que y’aura des reparations a faire sur la route, et quand on connait l’emplacement de chaque barak par coeur? L’essentiel, c’est de pas se planter a travers la glace.

Liosha nous accompagne. La grand-mere au depart me lance toute emue, que j’suis la premiere apres elle, a retourner sur les terres ou elle a vecue, avec son homme, pendant longtemps. On s’emmitouffle. 2 collants, 2 pantalons chauds. 4 paires de chaussettes. Du the, des lipioshi. Et c’est parti.

Bogomolka, la porte "sacree", au-dela de laquelle s'etendent les territoire de chasse traditionnels. Pause obligatoire. On y laisse quelques cigarettes, un billet, un bout de tissu, des boulons ou ce qui traine dans ses poches...

36eme reparation: refondre le bac a essence, pour refermer la fuite, grace a un clou chauffe a rouge

omorochka, la barque sans moteur du chasseur- pour pas faire de bruit

Passe le Bogomolka, pose bouffe et reparation a la barak de connaissances. Chaque proprio tient son endroit comme il l’entend. Chacun sait ou on peut trouver de quoi se chauffer, et le minimum pour passer la nuit. La barak qui nous logera cette nuit la fait raler les mecs: pas meme une casserole, pas meme un paquet de nouilles en depannage.

Plus on remonte la riviere, plus la glace se fait fine. Le courant des  sources qui alimentent la Bikin l’empechent par endroit de geler. Kostia sort son pic, verifier le passage.

140km, « la Garela ». Nichee entre une colline et la riviere, la barak de la grand-mere, telle qu’elle a toujours ete. Minuscule (6m carres a tout casser). La toiture en ecorce. Un vrai musee. Difficile de se representer ce que ca signifie vivre la-dedans a 2 et plus tant d’annees!

146km, « la Kitaiskaia ». Je jubile. L’endroit est magnifique. Un peu a l’ecart de la Bikin, entre plusieurs ruisseaux secondaires. La barak deja plus vivable, un Bania juste en face. Un terrain plat, de quoi y faire un jardin, quand la neige aura fondue… Voila, ou le reve commence…

Ecrit par admin_branchest in: Hiver,Kitaiskaia |
mar
12
2011
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La saison blanche

Au 43 rue Leninskaia, les murs ont froid depuis bien 1 mois. Kostia est en foret, l’oncle Misha aussi, et la grand-mere a deserte dans un interieur plus chauffe. Un tas de bois a fendre m’attend. L’oncle Yura m’aide a peter le cadenas, histoire de mettre le poele en route, tant qu’il tient toujours debout. 2 jours pleins avant de commencer a s’y sentir bien. Le 3eme jour, Kostia revient, fendre la deuxieme moitie du tas de bois. « Bez drov i bez liubov, v Rossie nie vyjivioh! »

Les motos-neige ont remplace les lodki. Celui d’Andrei et de Kostia a une gueule de peugeot 101 a pedale qui ne demarre que dans les descentes, s’il fallait comparer avec le genre mobylette. Il se demarre en tirant sur une ficelle qui s’re-enroule a chaque essai. Et n’offre aucune garantie de ne pas tomber en rade en plein trajet. Mon premier tour en « buran« , c’etait justement pour aller reparer leur epave a une 20aine de km de la. Fallait convaincre un pote de nous y conduire, plus trouver une chaine de rechange, et pour qu’un accord aboutisse positivement, parait-il faut imbiber son bonhomme de bons procedes. Heureusement tous sont plus ou moins equipes de  traineaux a tout fourrer, a empiler chevreuils et sangliers, plus tous ceux qui n’tiennent plus debout. Pour les accompagner, il a fallu argumenter. Partir en foret, c’est pas pour s’ballader, mais pour taffer. Et puis dans leur idee, galerer dans le vent froid, dans la graisse mecanique et le metal qui glace, ca vaut pas le coup, et c’est pas le lot d’une fille. Alors maitenant que j’y suis, je tente de me rendre utile. Allume un feu, chauffe le the, chantonne par-dessus leur casse-tete arrose de jurons. Renater raconte: « T’as loupe le meilleur. Janvier cette annee, oh comme c’etait romantique! -40 degres, de la neige jusqu’aux cuisses, a pas sortir de la barak! Romanticheski! Mais faut bien les attrapper, les zibelines, et faut bien sortir trouver de quoi grailler! Mais tu te rend compte! De la neige, jusque la! »

C’est qu’il avait pas de bons skis. C’est Tolia le specialiste (entre autres). Bois d’acacia, etuve a la maison, sans bac, prosto tak, a la bouilloire. Largeur et longueur selon le gabari du proprietaire. Et pour que ca glisse ou que ca croche (selon le sens du poil), on coud et colle dessous les peaux des pattes de cerfs. Komuz. i vsio!

Retour de reparation. Depuis mon arrivee le ciel se couvre pour la premiere fois. A voir comment que fond la glace, je ne sais pas si ce qui tombera sera neigeux ou pluvieux. En tous les cas, les 70cm de blancheur suffisent encore largement pour sillonner la foret et le village en moto-neige. C’est sur la riviere que ca devient dangereux. Pas de temps a perdre, au prochain coup de gel, faut s’y lancer, et avoir le temps de revenir avant que la fonte ne debute serieusement.

Ecrit par admin_branchest in: Hiver,Krasnii-iar |
mar
12
2011
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Vladivostok-Luchegorsk, sur un air d’ « A marche forcee »

Debut fevrier

Le port de Vladivostok...

A l'autre bout du monde, l'esthetique-ecologique ne s'est pas encore imposee...

« Voir Paris et mourrir ». Voila ce qu’en disent les Russes. C’est vrai qu’apres tout, Paris, c’est joli… je fais le plein de Sacre Coeur avant de m’envoler vers les rudesses russes. Apres les rondeurs et les douceurs du Centre-Bretagne, l’arrivee a Vladivostok m’agresse de beton et de glace sale. L’odeur de fleur des femmes rehaussent a peine la pauvrete visuelle de la ville post-militaire, des ordures qui trainent, et de l’air charge de gaz-pots d’echappements. Une butte me sauve. De la-haut on peut s’imaginer ailleurs. On peut voir a ses pieds un ensemble qui a du sens, juste un peu, au moins par le fait d’exister.

Dans la sacoche le roman de Slavomir Rawic, A Marche Forcee. Ca aide pas a depasser ce sentiment de grandiose noire embrouille qui risque d’attrapper quiconque, pour un peu qu’il veuille se frotter de pres a la vie Russe. Mais les amis s’donnent un peu d’air: « Aujourd’hui on va en nature »… A 4 voitures ils ont grimpe une colline, jusqu’au fort numero 7. Z’ont sorti le barbecue, les serviettes de table, les chaises, tout, comme de bons russes bien organises. Et puis on va visiter le fort souterrain qui date de l’epoque du tsar. Un truc immonde enorme integralement betonne. Le guide a la gueule ravinee raconte comment ils ont repousse les japonais. Ca doit etre la seule fois qu’il ait servi. On s’echange des cigaretttes.

Train de nuit. Chauffe au charbon, avec sa bouilloire collective. J’ai pris une place assise, les moins cheres. Pour une etrangere, c’est pas comprehensible. Le wagon sent l’alcool. Pas une pepette qui sent bon… La cheftaine est stressee: un type est entre avec un billet qui ne correspond pas. Toute la nuit quasiment elle a reconte les passagers. Au matin dehors la plaine, blanche, nue et froide. De la neige encore epaisse pour enfouir chaque village brinqueballant, encore vivant. Une 10zaine d’heure pour 600km, jusqu’a Luchegorsk. Une ville sans interet construite il y a peu, avec son hydro-electrique, ses barres de beton pour loger les pelleteurs de charbon, et son eglise toute neuve, construire par l’usine, evidemment.

C’est dans un de ces appartements decrepis que l’on m’attend. Ils sont une pelletee du village, a etre venus bosser a l’usine. « C’est dur, mais ca paye. » Raia est enceinte jusqu’aux dents. Elle attend que ca vienne, chez le cousin Vania. Je ne l’ai pas attendue, pour filer un matin, en stop, jusqu’aux village. L’hiver la piste est sans cesse parcourue par les camions forestiers. C’est un Chinois qui m’embarque en premier. On echange quelques mots. Ils nous laisse a mi-chemin, moi et un autre jeune parti a Iar voir la famille. Un second camionneur m’explique qu’il doit profiter de la piste d’hiver pour gagner des sous. L’ete, la piste est tellement degueulasse que la casse occasionnee rend  les trajets a peine rentables.

Puis y’a le pont, la Bikin, on descend, et on oublie tout, le gazoil, la glace sale de Vladivostok, les cheminees de Luchegorsk. Ici l’air est pur, la Bikin sauvage, une vie saine et tranquille bien possible…

Ecrit par admin_branchest in: Non classé |

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